Héritage immobilier : Décryptage des abattements et taux de droits de succession

Face à un héritage immobilier, les questions fiscales deviennent rapidement complexes et anxiogènes pour les héritiers. La transmission de patrimoine immobilier s’accompagne d’un cadre fiscal précis qui détermine les droits à payer au fisc. Entre abattements fiscaux, barèmes progressifs et dispositifs d’exonération, le régime des successions immobilières mérite une attention particulière. Comprendre ces mécanismes permet non seulement d’anticiper la charge fiscale, mais surtout d’optimiser légalement la transmission de son patrimoine. Ce décryptage des règles fiscales applicables aux successions immobilières vous guidera à travers les subtilités d’un système où chaque détail compte.

Les principes fondamentaux des droits de succession immobilière

La fiscalité successorale repose sur un ensemble de règles qui déterminent le montant des droits à payer lors de la transmission d’un bien immobilier après un décès. Ces droits varient considérablement selon le lien de parenté entre le défunt et l’héritier, la valeur des biens transmis et les dispositifs d’optimisation fiscale mis en place.

Le calcul des droits de succession s’effectue en plusieurs étapes. D’abord, il faut déterminer l’actif net successoral, c’est-à-dire la valeur totale des biens transmis après déduction des dettes du défunt. Pour les biens immobiliers, cette valeur correspond généralement à la valeur vénale du bien au jour du décès, soit le prix auquel le bien pourrait être vendu sur le marché.

Une fois cette valeur établie, le Code général des impôts prévoit l’application d’abattements qui viennent réduire l’assiette taxable. Ces abattements diffèrent selon le lien de parenté. Après application de ces abattements, les droits sont calculés selon un barème progressif par tranches, dont les taux augmentent avec le montant de l’héritage et varient selon le lien familial.

Il est fondamental de comprendre que la fiscalité successorale française taxe chaque héritier individuellement et non la succession dans son ensemble. Chaque héritier bénéficie donc de ses propres abattements et est imposé selon sa part d’héritage.

Le délai légal pour déposer la déclaration de succession est de 6 mois si le défunt est décédé en France métropolitaine, et de 12 mois s’il est décédé à l’étranger. Cette déclaration doit être déposée auprès du service des impôts du domicile du défunt, accompagnée du paiement des droits. Le non-respect de ce délai entraîne des pénalités de retard.

La valeur immobilière retenue par l’administration fiscale fait souvent l’objet de discussions. L’administration peut contester l’évaluation proposée par les héritiers si elle la juge sous-évaluée. Pour éviter ce risque, il est recommandé de s’appuyer sur des références de ventes similaires récentes ou sur l’expertise d’un professionnel de l’immobilier.

Notons que certains biens immobiliers peuvent bénéficier de régimes particuliers. C’est notamment le cas des monuments historiques, des bois et forêts ou encore des biens ruraux loués à long terme, qui peuvent sous certaines conditions bénéficier d’exonérations partielles.

La territorialité des droits de succession

Un aspect souvent méconnu concerne la territorialité des droits de succession. Si le défunt était domicilié fiscalement en France, tous ses biens, qu’ils soient situés en France ou à l’étranger, sont soumis aux droits de succession français. En revanche, si le défunt était domicilié fiscalement à l’étranger, seuls ses biens situés en France sont soumis aux droits de succession français, sous réserve des conventions fiscales internationales qui peuvent prévoir des règles différentes.

Cette dimension internationale de la fiscalité successorale prend une importance croissante avec la mobilité accrue des personnes et la diversification géographique des patrimoines. Elle nécessite une vigilance particulière pour éviter les situations de double imposition.

Les abattements fiscaux : un levier d’optimisation incontournable

Les abattements fiscaux constituent le premier niveau d’optimisation de la transmission immobilière. Ces réductions appliquées à la valeur taxable des biens transmis varient considérablement selon le lien de parenté entre le défunt et l’héritier.

Le système français privilégie clairement la transmission en ligne directe. En effet, les enfants du défunt bénéficient d’un abattement substantiel de 100 000 euros chacun sur leur part d’héritage. Cet abattement se renouvelle tous les 15 ans, ce qui permet d’envisager des stratégies de transmission anticipée via des donations régulières.

Pour les conjoints survivants et partenaires liés par un PACS, la situation est encore plus favorable puisqu’ils sont totalement exonérés de droits de succession depuis 2007. Cette exonération totale ne s’applique toutefois pas aux donations entre époux ou partenaires pacsés, qui bénéficient d’un abattement de 80 724 euros.

Les frères et sœurs du défunt disposent quant à eux d’un abattement de 15 932 euros, montant qui peut sembler modeste comparé à celui accordé aux descendants directs. Toutefois, sous certaines conditions strictes (célibat, veuvage ou divorce, âge ou infirmité, domicile commun avec le défunt), ils peuvent être totalement exonérés.

Pour les neveux et nièces, l’abattement se limite à 7 967 euros, tandis que pour les autres parents jusqu’au 4ème degré, il n’est que de 1 594 euros. Enfin, les personnes sans lien de parenté avec le défunt ne bénéficient d’aucun abattement spécifique, hormis l’abattement général de 1 594 euros.

À ces abattements liés au lien de parenté s’ajoutent des abattements spécifiques, comme celui de 159 325 euros prévu pour les personnes handicapées, cumulable avec les autres abattements. De même, un abattement de 31 865 euros s’applique sous certaines conditions aux donations d’argent consenties à un enfant, petit-enfant, arrière-petit-enfant ou, à défaut de descendance, à un neveu ou une nièce.

  • Abattement pour les enfants : 100 000 € par enfant
  • Exonération totale pour les conjoints et partenaires de PACS
  • Abattement pour les frères et sœurs : 15 932 €
  • Abattement pour les neveux et nièces : 7 967 €
  • Abattement pour les personnes handicapées : 159 325 € (cumulable)

Pour optimiser ces abattements, plusieurs stratégies peuvent être mises en place. La première consiste à anticiper la transmission par des donations régulières tous les 15 ans pour renouveler les abattements. Une autre approche consiste à utiliser le démembrement de propriété, en donnant la nue-propriété tout en conservant l’usufruit, ce qui permet de réduire la base taxable puisque seule la valeur de la nue-propriété est prise en compte pour le calcul des droits.

Il faut noter que ces abattements fiscaux sont individuels et s’appliquent à chaque héritier séparément. Ainsi, plus le nombre d’héritiers est élevé, plus le montant total des abattements applicables à la succession est important, ce qui peut conduire à une réduction significative de la charge fiscale globale.

Les abattements spécifiques aux biens immobiliers

Certains biens immobiliers bénéficient de régimes d’abattement particuliers. C’est notamment le cas de la résidence principale du défunt qui, lorsqu’elle est occupée à titre de résidence principale par le conjoint survivant, un enfant majeur ou mineur du défunt ou du conjoint, peut bénéficier d’un abattement de 20% sur sa valeur vénale. Cet abattement spécifique s’ajoute aux abattements personnels des héritiers.

Les biens ruraux loués par bail à long terme et les parts de groupements fonciers agricoles peuvent bénéficier, sous certaines conditions, d’une exonération partielle à hauteur de 75% jusqu’à 300 000 euros, puis de 50% au-delà. Ce dispositif vise à favoriser la transmission des exploitations agricoles et à préserver le caractère familial de l’agriculture française.

Le barème progressif des droits de succession : comprendre son fonctionnement

Après application des abattements, les droits de succession sont calculés selon un barème progressif par tranches. Ce système de taxation, similaire à celui de l’impôt sur le revenu, applique des taux croissants à mesure que la valeur de la part successorale augmente.

Pour les transmissions en ligne directe (parents à enfants), le barème comporte six tranches avec des taux allant de 5% à 45%. La première tranche, jusqu’à 8 072 euros, est imposée à 5%. Puis le taux augmente progressivement : 10% entre 8 072 et 12 109 euros, 15% entre 12 109 et 15 932 euros, 20% entre 15 932 et 552 324 euros, 30% entre 552 324 et 902 838 euros, et enfin 45% au-delà de 902 838 euros.

Cette progressivité du barème signifie que chaque portion de l’héritage est taxée à un taux différent. Par exemple, pour une part successorale de 600 000 euros transmise à un enfant (après abattement), les premiers 8 072 euros seront taxés à 5%, les 4 037 euros suivants à 10%, et ainsi de suite jusqu’à atteindre la dernière tranche.

Pour les frères et sœurs, le barème est beaucoup plus simple, avec seulement deux tranches : 35% jusqu’à 24 430 euros et 45% au-delà. Pour les parents jusqu’au 4ème degré, le taux unique est de 55%, tandis que pour les personnes sans lien de parenté avec le défunt, le taux atteint 60%.

Ces taux élevés pour les transmissions hors ligne directe soulignent l’importance de la planification successorale, notamment lorsque le défunt souhaite transmettre à des personnes qui ne sont pas ses descendants directs.

Le calcul des droits de succession peut rapidement devenir complexe, surtout lorsque la succession comporte plusieurs biens immobiliers de nature différente (résidence principale, investissements locatifs, terrains…) et plusieurs héritiers avec des liens de parenté différents.

Prenons l’exemple d’une succession comprenant une résidence principale d’une valeur de 500 000 euros et un appartement locatif évalué à 300 000 euros, avec deux enfants comme héritiers. Chaque enfant recevra la moitié de ces biens, soit une part de 400 000 euros. Après application de l’abattement de 100 000 euros, la base taxable sera de 300 000 euros pour chacun. Les droits seront calculés en appliquant le barème progressif à ces 300 000 euros, ce qui donnera une imposition nettement inférieure à celle qui aurait résulté de l’application du taux marginal de 20% à l’ensemble de la somme.

  • Ligne directe (parents-enfants) : 5% à 45% selon les tranches
  • Entre frères et sœurs : 35% jusqu’à 24 430 € puis 45%
  • Entre parents jusqu’au 4ème degré : 55%
  • Entre personnes non parentes : 60%

Il est à noter que ces taux d’imposition peuvent être réduits dans certains cas particuliers. Par exemple, les héritiers en ligne directe domiciliés dans certains départements d’outre-mer bénéficient d’une réduction de 50% sur les droits de succession, dans la limite de 46 000 euros.

L’impact du lieu de situation du bien immobilier

La localisation du bien immobilier peut avoir une incidence sur la fiscalité applicable. Pour les biens situés en France, les règles décrites précédemment s’appliquent pleinement. En revanche, pour les biens situés à l’étranger, la situation peut être plus complexe.

Si le défunt était domicilié fiscalement en France, ses biens immobiliers situés à l’étranger sont en principe soumis aux droits de succession français. Toutefois, pour éviter la double imposition, la France a conclu des conventions fiscales avec de nombreux pays. Ces conventions peuvent prévoir soit l’imposition exclusive dans le pays de situation du bien, soit l’imposition dans les deux pays avec imputation de l’impôt payé à l’étranger sur l’impôt français.

À l’inverse, si un non-résident possède un bien immobilier en France, ce bien sera soumis aux droits de succession français, quelle que soit la résidence fiscale du défunt ou des héritiers, sous réserve là encore des dispositions des conventions fiscales internationales.

Les dispositifs d’exonération et de réduction des droits

Au-delà des abattements classiques, le législateur français a mis en place plusieurs dispositifs spécifiques permettant d’alléger la charge fiscale liée aux successions immobilières.

L’un des plus notables concerne les monuments historiques. Les immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques peuvent bénéficier, sous certaines conditions, d’une exonération partielle des droits de succession à hauteur de 75% de leur valeur. Cette exonération est conditionnée à la signature d’une convention à durée indéterminée avec les ministres de la culture et des finances, par laquelle les héritiers s’engagent à assurer la conservation de l’immeuble, à le maintenir accessible au public et à ne pas le céder.

De même, les bois et forêts et les parts de groupements forestiers peuvent bénéficier d’une réduction des droits de succession à hauteur de 75% de leur valeur. Cette exonération est soumise à l’engagement de l’héritier d’appliquer pendant 30 ans une gestion durable conforme à un document de gestion forestière agréé.

Un autre dispositif intéressant concerne les immeubles neufs à usage d’habitation. Lorsque ces biens ont été acquis par le défunt entre le 1er juin 1993 et le 31 décembre 1994, ou entre le 1er août 1995 et le 31 décembre 1995, et qu’ils étaient loués par lui pendant au moins deux ans au moment du décès, ils bénéficient d’une exonération de droits de succession à hauteur de 25% de leur valeur.

Le pacte Dutreil, bien que principalement conçu pour faciliter la transmission d’entreprises familiales, peut également s’appliquer aux sociétés immobilières. Ce dispositif permet, sous certaines conditions strictes (notamment un engagement collectif de conservation des titres), de bénéficier d’une exonération de droits de succession à hauteur de 75% de la valeur des titres transmis.

Pour les biens ruraux loués par bail à long terme et les parts de groupements fonciers agricoles (GFA), l’exonération peut atteindre 75% de leur valeur dans la limite de 300 000 euros, et 50% au-delà. Cette mesure vise à préserver le caractère familial des exploitations agricoles et à éviter leur démembrement lors des successions.

Les entreprises individuelles à caractère commercial, industriel, artisanal, agricole ou libéral peuvent bénéficier d’une exonération partielle de droits de succession à hauteur de 75% de leur valeur, sous condition d’un engagement individuel de conservation des biens nécessaires à l’exploitation pendant quatre ans à compter de la transmission.

Enfin, il existe des dispositifs spécifiques aux départements d’outre-mer, avec notamment une réduction de 50% des droits de succession pour les biens situés en Guadeloupe, Guyane, Martinique et à La Réunion, dans la limite de 46 000 euros.

  • Exonération de 75% pour les monuments historiques (sous conditions)
  • Réduction de 75% pour les bois et forêts
  • Exonération de 25% pour certains immeubles neufs
  • Pacte Dutreil : exonération de 75% pour les sociétés immobilières
  • Exonération partielle pour les biens ruraux loués à long terme

Le cas particulier de la résidence principale

La résidence principale du défunt bénéficie d’un traitement fiscal particulier lorsqu’elle est occupée, au moment du décès, par le conjoint survivant, un enfant mineur ou majeur du défunt ou du conjoint, ou encore une personne à charge. Dans ce cas, un abattement de 20% s’applique sur la valeur vénale du bien pour le calcul des droits de succession.

Cet avantage fiscal vise à protéger le logement familial et à éviter que les héritiers ne soient contraints de vendre le bien pour payer les droits de succession. Il s’ajoute aux abattements personnels dont bénéficient les héritiers en fonction de leur lien de parenté avec le défunt.

Il est à noter que cet abattement ne s’applique qu’à la résidence principale et non aux résidences secondaires ou aux biens locatifs. De plus, il ne s’applique que si le bien est effectivement occupé au moment du décès, ce qui exclut par exemple les personnes âgées ayant dû quitter leur domicile pour être hébergées en maison de retraite.

Stratégies d’optimisation pour la transmission immobilière

Face à une fiscalité successorale qui peut s’avérer lourde, plusieurs stratégies d’optimisation peuvent être envisagées pour réduire la charge fiscale liée à la transmission de biens immobiliers.

La donation anticipée constitue l’un des leviers les plus efficaces. En effet, les abattements fiscaux se renouvellent tous les 15 ans, ce qui permet d’envisager plusieurs donations successives au cours d’une vie. De plus, les donations en pleine propriété consenties plus de 15 ans avant le décès du donateur ne sont pas réintégrées dans la succession, ce qui permet une véritable économie fiscale.

Le démembrement de propriété offre également des perspectives intéressantes. Cette technique consiste à séparer la propriété d’un bien entre l’usufruit (droit d’usage et de perception des revenus) et la nue-propriété (droit de disposer du bien). En donnant uniquement la nue-propriété d’un bien tout en conservant l’usufruit, le donateur réduit la valeur taxable de la donation puisque seule la nue-propriété est soumise aux droits. De plus, au décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devient automatiquement plein propriétaire sans avoir à payer de droits supplémentaires.

La valeur de la nue-propriété est déterminée en fonction de l’âge de l’usufruitier selon un barème fiscal. Par exemple, si l’usufruitier a moins de 51 ans, la nue-propriété est évaluée à 50% de la pleine propriété. Ce pourcentage augmente avec l’âge de l’usufruitier, jusqu’à atteindre 90% lorsque celui-ci a plus de 91 ans.

L’assurance-vie constitue un autre outil privilégié de transmission patrimoniale. Les capitaux transmis via un contrat d’assurance-vie échappent aux règles des droits de succession et bénéficient d’un régime fiscal spécifique, généralement plus favorable. Pour les versements effectués avant 70 ans, chaque bénéficiaire profite d’un abattement de 152 500 euros, au-delà duquel un prélèvement de 20% s’applique jusqu’à 700 000 euros, puis de 31,25% au-delà.

La société civile immobilière (SCI) peut également s’avérer utile dans une stratégie de transmission. En transformant un bien immobilier en parts sociales, la SCI facilite les donations fractionnées et permet d’appliquer une décote pour absence de liquidité ou de contrôle, réduisant ainsi la base taxable.

Pour les monuments historiques ou les biens présentant un intérêt patrimonial particulier, le dispositif de dation en paiement peut être envisagé. Il permet de s’acquitter des droits de succession par la remise à l’État de biens présentant un intérêt artistique ou historique national.

Enfin, pour les successions comportant des biens immobiliers de valeur importante, le paiement différé ou fractionné des droits de succession peut être sollicité auprès de l’administration fiscale. Ce dispositif permet d’étaler le paiement sur plusieurs années, moyennant un taux d’intérêt réduit, évitant ainsi aux héritiers de devoir vendre précipitamment les biens reçus pour s’acquitter des droits.

  • Donation anticipée tous les 15 ans pour renouveler les abattements
  • Démembrement de propriété (donation de la nue-propriété)
  • Utilisation de l’assurance-vie comme enveloppe de transmission
  • Création d’une SCI pour faciliter les donations fractionnées
  • Dation en paiement pour les biens d’intérêt patrimonial

Le rôle du testament dans l’optimisation successorale

Le testament joue un rôle central dans l’organisation de sa succession, notamment pour orienter la transmission vers les héritiers bénéficiant des régimes fiscaux les plus favorables. Il permet de désigner précisément les bénéficiaires de certains biens, dans les limites de la réserve héréditaire qui protège les descendants.

Par exemple, en l’absence d’enfants, il peut être judicieux de léguer ses biens à un neveu ou une nièce plutôt qu’à un frère ou une sœur, les premiers bénéficiant d’une fiscalité légèrement plus avantageuse. De même, le testament permet d’organiser le partage des biens de façon à équilibrer les parts de chaque héritier et à tenir compte des abattements disponibles.

Le testament peut également comporter des dispositions particulières comme le legs graduel ou résiduel, permettant d’organiser une transmission sur plusieurs générations tout en optimisant la fiscalité applicable à chaque étape de la transmission.

Prévoir l’avenir : évolutions récentes et perspectives

La fiscalité successorale n’est pas figée et connaît régulièrement des évolutions qui peuvent impacter significativement les stratégies de transmission patrimoniale.

Ces dernières années, plusieurs réformes ont modifié le paysage de la fiscalité des successions. Parmi les évolutions notables, on peut citer le relèvement du montant des abattements en ligne directe à 100 000 euros en 2012, après une période où ils avaient été réduits à 159 325 euros, puis à 100 000 euros. De même, l’exonération totale de droits de succession entre conjoints et partenaires pacsés, instaurée en 2007, a considérablement modifié les stratégies de transmission au sein des couples.

Les débats actuels autour de la fiscalité du patrimoine laissent entrevoir plusieurs pistes d’évolution possible. Certains plaident pour un allègement des droits de succession, considérant qu’ils constituent un frein à l’entrepreneuriat et à la constitution de patrimoines familiaux pérennes. D’autres, au contraire, défendent un renforcement de cette fiscalité au nom de la lutte contre les inégalités de patrimoine et de la mobilité sociale.

Parmi les réformes envisagées, on peut mentionner la suppression ou la modification du régime fiscal de l’assurance-vie, régulièrement critiqué pour les avantages qu’il offre aux patrimoines les plus importants. De même, une refonte du barème des droits de succession, inchangé depuis de nombreuses années et non indexé sur l’inflation, pourrait être à l’ordre du jour.

La question de la réserve héréditaire, cette part du patrimoine qui doit obligatoirement revenir aux descendants, fait également l’objet de discussions. Certains pays européens l’ont supprimée ou assouplie, et des voix s’élèvent en France pour une évolution similaire, qui donnerait plus de liberté aux testateurs dans l’organisation de leur succession.

Le traitement fiscal différencié selon le lien de parenté est également questionné. Le système actuel favorise très nettement la transmission en ligne directe, avec des taux qui peuvent atteindre 60% pour les personnes sans lien de parenté. Cette situation peut s’avérer problématique dans un contexte d’évolution des structures familiales (familles recomposées, couples non mariés, etc.).

Sur le plan international, la mobilité croissante des personnes et des capitaux pose la question de l’harmonisation des régimes fiscaux successoraux. Les disparités importantes entre pays peuvent conduire à des stratégies d’optimisation basées sur la délocalisation des personnes ou des biens, ce qui pourrait inciter à une coordination accrue au niveau européen ou international.

Face à ces possibles évolutions, la prudence recommande d’adopter des stratégies de transmission flexibles, susceptibles d’être adaptées en fonction des changements législatifs. Le recours à des mécanismes comme la donation-partage avec clause de révision peut offrir cette souplesse, en permettant d’ajuster la répartition des biens en fonction de l’évolution de leur valeur et du cadre fiscal.

L’impact du numérique sur la transmission patrimoniale

L’ère numérique transforme également la gestion et la transmission du patrimoine. L’émergence de plateformes digitales facilite l’accès à l’information et aux services de gestion patrimoniale, démocratisant des stratégies autrefois réservées aux patrimoines les plus importants.

De même, le développement de la blockchain et des actifs numériques (cryptomonnaies, NFT, etc.) pose de nouvelles questions en matière de succession. Comment évaluer ces actifs ? Comment assurer leur transmission effective ? Le droit successoral et la fiscalité devront nécessairement s’adapter à ces nouvelles formes de patrimoine.

L’intelligence artificielle et les outils de simulation permettent désormais d’optimiser finement les stratégies de transmission, en testant différents scénarios et en identifiant la solution la plus avantageuse fiscalement. Ces outils, en se démocratisant, pourraient contribuer à une meilleure planification successorale pour un plus grand nombre.

FAQ sur les droits de succession immobilière

Comment sont évalués les biens immobiliers dans une succession ?
Les biens immobiliers sont évalués à leur valeur vénale au jour du décès, c’est-à-dire au prix auquel ils pourraient être vendus dans des conditions normales de marché. Cette évaluation peut s’appuyer sur des références de ventes similaires récentes, sur l’avis d’un professionnel de l’immobilier, ou sur une expertise formelle.

Peut-on contester l’évaluation faite par l’administration fiscale ?
Oui, il est possible de contester l’évaluation retenue par l’administration fiscale si vous la jugez surévaluée. Cette contestation doit s’appuyer sur des éléments objectifs (références de transactions comparables, expertises, etc.) et peut déboucher sur un recours contentieux si aucun accord n’est trouvé.

Quels sont les délais pour payer les droits de succession ?
Les droits de succession doivent en principe être acquittés au moment du dépôt de la déclaration de succession, soit dans les 6 mois suivant le décès si celui-ci est survenu en France, ou 12 mois s’il est survenu à l’étranger. Toutefois, des facilités de paiement peuvent être accordées : paiement différé (jusqu’à 5 ans) ou fractionné (sur 10 ans maximum) pour certains types de biens, notamment les entreprises.

Que se passe-t-il si un héritier ne peut pas payer sa part des droits de succession ?
Si un héritier ne peut pas payer sa part des droits de succession, plusieurs solutions existent : demander un étalement du paiement à l’administration fiscale, vendre une partie des biens hérités pour dégager les liquidités nécessaires, ou renoncer purement et simplement à la succession si le passif (dettes + droits à payer) excède l’actif.

Les dettes du défunt sont-elles déductibles de l’actif successoral ?
Oui, les dettes existantes au jour du décès sont déductibles de l’actif successoral pour le calcul des droits de succession. Cela inclut notamment les emprunts immobiliers en cours, les impôts dus, les factures non réglées, etc. Toutefois, ces dettes doivent être justifiées par des titres susceptibles de faire preuve en justice contre le défunt.

Comment fonctionne la donation avec réserve d’usufruit ?
Dans une donation avec réserve d’usufruit, le donateur transmet la nue-propriété du bien tout en conservant l’usufruit, c’est-à-dire le droit d’utiliser le bien et d’en percevoir les revenus. Les droits de donation ne sont calculés que sur la valeur de la nue-propriété, déterminée selon un barème fiscal qui tient compte de l’âge de l’usufruitier. Au décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devient automatiquement plein propriétaire sans avoir à payer de droits supplémentaires.

Les donations antérieures sont-elles prises en compte lors de la succession ?
Oui, les donations consenties par le défunt à ses héritiers au cours des 15 années précédant son décès sont réintégrées dans l’actif successoral pour le calcul des droits de succession. Cette règle vise à éviter que des donations successives ne permettent de contourner la progressivité du barème fiscal. En revanche, les donations réalisées plus de 15 ans avant le décès ne sont pas prises en compte.